Journal de bord de l'enquête TAOA en Argentine

Nous avons parcouru l’Argentine pendant 3 mois (nov 10- janv 11) pour étudier l’expérience des clubs de troc,  10 000 km, 150 heures de bus, pour rencontrer et interroger une trentaine de personnes dans tout le pays. Voici le résumé de l’ensemble de nos entretiens, à retrouver également sur la Googlemap de l’enquête TAOA.

Rappels historiques : Lire l’article complet sur l’histoire des clubs de troc argentins

  • 1995 : création du premier club de troc à Bernal (province de Buenos Aires)
  • 1996 : ses 3 fondateurs, Ruben Ravera, Horacio Covas et Carlos de Sanzo sont invités dans un programme TV qui médiatisera largement l’idée séduisante des clubs de troc.
  • 1996- 2000 : Les nodos se multiplient, se forme le Red Global de Trueque, les nodos s’organisent en zones dans la province de Buenos Aires et à l’intérieur du pays.
  • 2001 : Le réseau se scinde en deux : le RGT et le RTS (Red de Trueque Solidario). L’un a une approche entrepreneuriale et l’autre promeut un modèle « solidaire ». D’autres plus petits réseaux resteront indépendants du RGT comme du RTS.
  • 2002 : après une croissance explosive (2,5 millions de participants), le réseau s’écroule en l’espace de quelques mois  (lire les raisons de la chute)

Lexique : nodo = club de troc / feria = Bourse Locale d’Echange / créditos = le nom générique pour les différentes monnaies des clubs de troc / l’arbolito = le nom spécifique de la monnaie du RGT


1. Le Chill House, le meilleur bureau du monde !


Au total, nous aurons passé plus d’un mois dans cette grande maison sur 3 étages, une sorte de grande colloc où on s’est senti comme à la maison. L’idéal pour installer le quartier général de TAOA!

Adresse
Agüero 781, Buenos Aires
www.chillhouse.com.ar

 

2. Héloisa, la référence dans le monde sur le troc argentin.


Dès notre arrivée à Buenos Aires, nous rencontrons Heloisa Primavera. Engagée dès 1996 dans la promotion des réseaux de troc avec monnaie sociale en Amérique Latine, elle jouera un rôle important au sein du RTS (Red de Trueque Solidario). Au sein du nodo Obelisco, elle développe notamment de nombreux modules de formation, destinés à tous (avec Carlos de Valle) : alphabétisation économique, coaching et développement personnel, créer son activité et devenir un micro-entrepreneur.

Professeur en sciences sociales à l’Université de Buenos Aires, elle est  aussi co-fondatrice du RedLASES (Réseau Latinoaméricain de Socioéconomie Solidaire).

Contact : heloisa.primavera@gmail.com

 

3. Marcelo, le collectionneur de créditos

 

Marcelo est passionné par l’expérience des clubs de troc en Argentine et collectionne les différents créditos qui ont été en circulation dans le pays. Son précieux trésor compte près de 2500 créditos !

Nous l’avons rencontré grâce à Tweeter et depuis, nous travaillons ensemble. Marcelo nous a donné des contacts à travers tous le pays, et nous lui avons ramené de nouveaux créditos pour compléter sa collection.

Contact : russiannotes@yahoo.com.ar

 

4. Ruben Ravera, fondateur du premier club de troc

 

Ruben Ravera est l’un des 3 fondateurs du tout premier club de troc en Argentine. Avec Horacio Covas et Carlos de Sanzo, ils formeront  le RGT (Red Global de Trueque), le plus important réseau de troc du pays. Les pratiques de ce réseau seront fortement critiquées, notamment leur modèle de franchise et la logique entrepreneuriale des “3 de Bernal”.

Bien que le RGT se soit effondré en 2002, Ruben travaille actuellement sur un nouveau “système opératif” en vue de relancer le RGT en 2012, avec une logique toujours plus entrepreneuriale que solidaire.

Chaque samedi, 4 ou 5 résistants du RGT se retrouvent, de 11h à 12h au bar el Pitchin, av De Mayo 802.

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5. Premier nodo, première féria pour TAOA

 

Le nodo de San Martin est situé dans un quartier pauvre du Grand Buenos Aires. Il est créé en 2003, donc après la chute du troc. La crise du troc fut si violente en 2002, que la grande majorité des nodos ont perdu la confiance de leurs membres qui ne voulaient plus entendre parler du troc. Pour ceux qui voulaient poursuivre l’expérience, il était judicieux de tout recommencer sur de nouvelles bases.

Entre 100 et 200 personnes participent chaque semaine aux ferias. On y échange principalement des vêtements seconde main, on trouve assez peu de productions artisanales. Ce nodo fait partie des 6 nodos qui sont toujours organisés en réseau, au sein du RTZO (Red de Trueque Zona Oueste).

Adresse
Plaza Billinghurst,
San Martin, GBA
Ferias > tous les lundi et mercredi à 14h30
Coordinatrice : Nimia
Tél : 484 20267
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6. Nodo historique, le 1er créé dans la capitale et le 2ième du pays.

A 70 ans, la fondatrice du nodo Congreso, Betty, prothésiste dentaire à la retraite, assure toujours la coordination de son nodo. Pendant près de 15 ans il ne s’est jamais arrêté de fonctionner mais il ne compte aujourd’hui plus qu’une vingtaine de personnes.

Adresse : Saavedra 84, Capital Federal

Feria > tous les jeudis à 18h
Coordinatrice : Betty Arreguito
Tél : 4861 5238
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7. Les vestiges du nodo le plus important de la capitale

 

Créé en 1999, le nodo la Chacarita fut l’un des plus importants de la capitale. A l’apogée du troc, les 5 étages de l’immeuble voyaient défiler près de 5000 personnes en une seule journée, on se bousculait à l’entrée de 9h à minuit.

Il ne compte aujourd’hui plus qu’une cinquantaine de personnes qui échangent désormais en troc direct. L’expérience des creditos, leur inflation galopante puis leur perte de valeur les a sans doute vacciné.

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Adresse
Estacion Frederico la Croze, CF
Edificio Mutual Sentimiento, 1er étage
Feria >  tous les mercredi à 13h30, et les samedis matin
Coordinatrice : Gomez Maria de la Mercedez

8. Un mini nodo à la Boca

 

La Boca, quartier pauvre du Sud de Buenos Aires, à côté du fameux Caminito touristique et coloré, est un nodo moribond, 20 à 30 personnes, peu d’échanges, peu de produits (quelques habits usagés), quelques participants qui se retrouvent pour le plaisir plus que par nécessité. Il est un des seul vestige du réseau RGT, à l’image des créditos utilisés pour les échanges, le fameux arbolito à l’origine de la chute des clubs de troc. Comme un symbole de cette chute, les échanges se font aujourd’hui avec des anciens billets de 100 créditos, “dévalués” à 1 crédito.
Adresse
Puerto de Palos 839,
La Boca, Capital Federal
Feria > tous les vendredi à 17h
Coordinatrice : Cristina Mirabelli


9. Un nodo actif dans le seul réseau toujours actif

 

Le nodo de Rafael Castillo, créé en 2000, est aujourd’hui un des nodos les plus actifs, avec à chaque féria plus de 200 personnes, et des rencontres 3 fois par semaines. Il est situé dans la province de Buenos Aires, dans une zone assez pauvre et même si une partie des participants viennent pour le lien social, il permet à d’autres d’augmenter leur pouvoir d’achat et de mieux vivre. Dans les années 2000, le nodo comptait plusieurs milliers de participants. Il est toujours affilié au réseau RTZO, seul réseau encore actif.
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Ferias > tous les mardi, jeudi et samedi
Coordinatrice : Amalia
Tél :4690 4606

10. Fuerza Verde, le réseau de troc écologiste


Hector Faldeta est un entrepreneur social. En 1998, il crée la Fondation Naturaleza Viva. Hector a une petite affaire à Florencio Varela qui marche bien (il loue des emplacements dans un marché) et ses bénéfices financent les actions de sa Fondation.

Fin des années 90, la Fondation lance un réseau de troc indépendant, Fuerza Verde. En 2001, le réseau compte près de 150 nodos et le seul nodo de Florencio Varela accueille 10 000 personnes tous les samedis. La philosophie du réseau s’appuie sur 2 piliers : l’aide sociale et l‘écologie.

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Leurs creditos sont particulièrement difficiles à falsifier car leur impression coûte chère (texte en braille, impression couleurs, papier recyclé)

En 2002, Fuerza Verde s’effondre comme la plupart des réseaux de troc du pays. Aujourd’hui, la Fondation n’est plus du tout impliquée dans les clubs de troc, elle continue cependant à pratiquer le troc direct (sans monnaie complémentaire).

Adresse
Fundacion Naturaleza Viva
Av. La Plata Lote 8 – La Capilla
Florencio Varela (C.P.1888)
Cel. 15-4991-4856
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11. Un nodo prêt à renaître de ses cendres

 

En 1998, Beatriz Rivero participe à la rencontre “Buenos Aires sin Fronteras”, elle entend pour la première fois parler des clubs de troc, l’idée et le projet la fascinent. Elle participe alors à de nombreux cours,  rencontre une tonne de personnes et décide de créer un nodo dans son quartier : le nodo Estrella.

“Nous ne voulions pas attendre que le monde change, nous sommes le futur, nous sommes la solution !”

Son nodo accueillera jusqu’à 500 personnes, toutes les professions sont représentées. Parmi les produits échangés, on trouve même des places pour le cinéma du centre commercial Abasto.

Avec la crise du troc, le nodo a fermé mais Beatriz est prête à relancer l’expérience, 9 autres personnes sont motivées, elles attendent juste de trouver un local, en cours de négociation avec la mairie. A suivre …

Contact : Beatriz Riveiro
4922-7339

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12. Caritas soutient le nodo de Parana, pour lutter contre la pauvreté.


Le nodo est créé en 2002 grâce au soutien de Caritas (seul diocèse du pays à s’impliquer dans le troc). En effet, le troc rejoint les actions de Caritas puisque sa fonction première est de réinsérer les plus pauvres grâce à la production et l’échange de biens.
C’est le premier nodo de la région qui en comptera rapidement  7, organisés indépendamment des grands réseaux du pays. Plus de 500 personnes viennent à la feria du dimanche. Mais ces nodos ne survivront pas à la chute du troc, tous ont aujourd’hui disparu.

Nous rencontrons Patricia Romero, ancienne coordinatrice du nodo de Caritas qui nous témoigne d’une expérience qui a radicalement changé sa vie.
Contact
patriciamariaromero@hotmail.com
Caritas, calle Montiel, Parana, Santa Fe
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13. Les clubs de troc, un outil pour l’économie sociale et solidaire.

 

Depuis ses débuts en 1996, l’association Poriajhu a été imaginée comme un espace indépendant où construire un pouvoir citoyen en dehors des institutions traditionnelles. Les priorités de l’association sont : les Jeunes et l’Education, l’Economie Solidaire et la Communication.

Pour l’association, le troc est  un nouvel espace d’échanges économiques alternatifs pour permettre le développement de projets éducatifs et de promotion sociale. C’est un outil aux côtés du micro crédit, des coopératives de productions, de la radio solidaire …

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Nodo de la Enmerada
Santiago 656, Capitan Bermudez
une cinquantaine de personnes
Coordinatrice : Oviedo, oviedoc28@yahoo.com.ar

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14. Daniel Ilari un coordinateur modèle et leader

 

Daniel crée le nodo de Venado Tuerto en 1999. Agrochimiste et entrepreneur, son engagement social au sein de sa communauté est impressionnant, il a notamment lancé il y a 2 ans une université populaire pour adultes.

Son nodo est l’un des rares à avoir résisté à la crise du troc et cela tient sans aucun doute à sa personnalité généreuse, son investissement sans égal, et sa capacité à rassembler. Les ferias sont très animées, la salle de la paroisse se remplit vite, vêtements, gâteaux, légumes s’échangent dans une ambiance festive.
Chaque semaine, l’entreprise de Daniel achète pour 200 pesos de sucre, lait, huile pour approvisionner le nodo en matières premières et favoriser la production.

La monnaie est oxydée de 10% tous les 6 mois. Le nodo compte aujourd’hui 200 personnes (vs. 4000 pers en 2001)

Ferias :
– tous les mardis et vendredis à 18h à la paroisse Perpetuo Socorro, esquina de calles 3 de Febrero y Pte Peron.
– tous les lundis à la vecinal del barrio Ciudad Nueva, calle Libertad y calle 104
Contact: Daniel Ilari
danielilari@arnet.com.ar
03462 15502866
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15. Premier témoignage sur les pratiques commerciales de la “franchise” de Bernal

Entre 2 bus, nous rencontrons Diego Raschetti, ancien coordinateur d’un nodo à Cordoba, très impliqué dans le réseau régional. El Red Nacional de Cordoba (qui s’étend en fait seulement à la province de Cordoba), compte une centaine de nodos. Diego nous raconte qu’il arrivait à s’habiller et à manger grâce aux nodos. Le réseau s’effondrera complètement avec la chute du troc en 2002.

Ce que nous retenons de cet entretien c’est avant tout le témoignage de Diego sur le modèle de franchise de Bernal. Dans les 6 derniers mois, le RGT a ouvert des milliers de nodos sans lendemain. Les coordinateurs vendaient 50 créditos pour 2 pesos aux nouveaux membres qui n’avaient pas l’obligation d’amener des produits à échanger. Ils se retrouvaient alors avec plein de créditos et rien à acheter. Diego soupçonne certains d’être devenus millionnaires grâce à cette pratique peu sociale.

Contact: Diego Raschetti
panchogaris@gmail.com

 

16. A Salta, un réseau de plus qui s’est effondré !

 

Marta Montero était la coordinatrice de 2 nodos à Salta et garde une certaine nostalgie de cette époque qu’elle a trouvé “merveilleuse”.
Pour elle, la crise argentine et l’émergence du troc a permis a beaucoup de découvrir en eux une véritable force productive. Elle témoigne de l’incroyable créativité des acteurs du troc argentin et cite Einstein “dans les périodes de crise, surgit l’ingéniosité de l’homme”.

Le Red de Trueque Solidario de Salta, réseau indépendant, compte une quinzaine de nodos à Salta avec 3000 personnes. Ce qui est relatif quand on sait que le nodo de Mendoza attirait 30 000 personnes. Le réseau de Salta s’effondre comme les autres en 2002.

Contact: Marta Montero
martamontero@hotmail.com

 

17. Une banque de temps pour financer des projets communautaires

 

Tout commence quand une quarantaine de familles décident de créer une école coopérative alternative (autour de l’art et de la nature). Pour financer ce projet, ils créent un système d’échange : el Banco de Horas Comunitario.

Différent des clubs de troc, sa monnaie, le SOL, est adossée sur des choses tangibles comme des promesses de travail signées (2h de peinture, 1 douzaine d’empenadas …) ou des produits offerts par des entreprises (gâteaux, savon, bois …). La monnaie est donc strictement émise en fonction des valeurs stockées par la banque.

Les professeurs sont payés en SOL, quand les parents inscrivent leurs enfants, ils consultent la liste de leurs besoins et signent des promesses de travail.

La Fondation SOL continue à soutenir différents projets communautaires en les finançant en SOL, et ça marche ! Plus d’infos.

Féria tous les samedis à Capilla del Monte (une centaine de personnes)

Contact : Marcelo Caldano
marcelocaldano@yahoo.com.ar

 

18. Une deuxième banque de temps à San Marco de Sierras

 

La banque de temps de San Marco de Sierras est créé en 2008, sur le modèle de la banque de temps de Capilla del Monte

Leur monnaie est la même qu’à Capilla del Monte, les SOL. De même, elle fonctionne avec un “respaldo”, c’est une monnaie adossée sur des biens tangibles.

Pour recevoir ses premiers SOL, il faut :
– soit échanger un produit ou service à un autre membre contre des SOL,
– soit laisser des produits (de la même valeur que le montant des SOL demandé) à la banque qui va les stocker et constituer ainsi son “respaldo” ( fond de garantie).
Feria : tous les samedis à 18h (Une cinquantaine de personnes)

Adresse
A la bibliothèque populaire
sur la place principale de San Marco de Sierras

Contact :  Aldo

 

19. Le troc fait naître un poète

 

En 1995, Nelson Cesar Medez voit la fameuse émission de télévision qui médiatisera et lancera le phénomène des clubs de troc. Les 3 fondateurs de Bernal sont invités et expliquent qu’on peut créer une activité sans payer de cotisations. La situation est déjà difficile et Nelson cherche justement à lancer une activité qui ne lui demande pas d’engager des frais qu’il n’a pas.

Très investi dans le réseau de troc, Nelson est un élève assidu des modules de formation du nodo Obelisco. Il insistera sur le rôle crucial de l’information “la première règle dans un nodo c’est que tout le monde doit connaître les règles !”

Au sein du réseau, il se lance dans l’écriture de poèmes et publiera même un court recueil de poèmes. Il vient de lancer un journal d’information solidaire à Jujuy.

Nelson témoigne d’une expérience extraordinaire “le club de troc m’a permis de réussir quelque chose que je n’aurais jamais imaginé faire”. Mais se dégage aussi beaucoup de ressentiment, le projet solidaire du troc ayant été dénaturé par des coordinateurs ou des membres qui n’ont pas pris la peine de comprendre en quoi réèllement consistait les clubs de troc.

Contact : nelsoncesarmedez@hotmail.com

 

20. Le troc, une tradition ancestrale de la région andine

 

Le troc direct existe dans la région andine depuis des milliers d’années, il se pratiquait de Jujuy à Mendoza, des deux côtés de la Cordillère des Andes. On ne parlait d’ailleurs pas de “trueque”, on disait “hacer una gauchada” (du termes gauchos) qui signifie faire une faveur. Cette tradition ancestrale vient des villages isolés de la Puna, région de la Cordillère, située entre 3500 et 4200 mètres. Il existe de nombreux petits villages où ils vivent en autosuffisance, travaillent les tissus et le cuir, produisent des légumes, élèvent des bêtes …A Santa Catalina, depuis 200 ans, chaque année s’organise une grande feria sans argent : la feria del trueque.

Julio était très engagé dans le réseau de troc du Nord. Tout a commencé quand une personne de Bernal est venue lui proposer de lancer un club de troc au sein de sa maison. Avec son épouse, ils se rendent à Bernal et à leur retour invitent voisins et amis à participer à cette nouvelle initiative. En 1999, une trentaine de personnes se retrouvent dans leur salon. Puis le nodo se déplacera dans un local de la municipalité pour accueillir une centaine de personnes. Jujuy comptait 25 nodos, aujourd’hui tous ont disparu.

Contact: Julio Irogoitia
julioirigoitia@yahoo.com.ar

 

21. Relancer le troc en introduisant des coopératives de production

 

L’association Bienaventurados de los Pobres, depuis plus de vingt ans, s’est donnée pour mission de promouvoir avec les familles pauvres, le développement d’alternatives de vie économiquement viables et écologiquement durables. A l’origine, sa mission était de relocaliser l’économie, notamment via le retour à la “paysannerie”.

 

En 2000, les animateurs communautaires de BP, accompagnés des membres du syndicat des “travailleurs domestiques” lancent un nodo, comptant à ses débuts une dizaine de personnes. L’expérience prend très vite et pas moins de 12 nodos sont créés dans la région avec une centaine de personnes par nodo. Mais le réseau s’effondrera, comme les autres, en 2002.

L’association Bienaventurados de los Pobres continue ses actions et ambitionne de relancer une expérience de troc en dynamisant l’effort de production. Ils souhaiteraient créer des coopératives pour pousser les gens à produire et les excédents de production pourraient ainsi être échangés dans les clubs de troc.

Contact: Juan José Sanchez
sanchez@bepe.org.ar

 

22. Une monnaie avant tout LOCALE

 

En 1996, un petit groupe de personnes mené par Alberto Marino prend connaissance de l’expérience du RGT. En 1997, il crée la Red de Mendoza. Le premier nodo compte moins de 10 personnes mais en un an et demi, il y a près de 20 nodos et 4000 personnes dans le réseau.
En 1998, ils se séparent du RGT, “ce qui nous a influencé a été le concept des monnaies locales qu’utilisaient d’autres expériences dans le monde et le sujet du développement local. Nos réflexions de l’époque, l’inconvénient d’une monnaie nationale comme l’arbolito, nos différences de point de vue avec le RGT, nous ont conduit  à la conclusion qu’il était nécessaire de prendre un chemin indépendant”.
En 1999, ils créent la Fondation El prosumidor pour un développement local autosuffisant, et commencent à éditer la monnaie locale de Mendoza : l’EcoVale.

En 2002, 200 à 600 000 personnes pratiquent le troc (sur une population d’1,8 millions de pers), et une fois de plus, le réseau s’effondre. Mais la Fondation continue toujours ses activités aujourd’hui.

A noter que les premiers billets de la banque Palmas au Brésil sont imprimés par la Fondation El Prosumidor. Ils ressemblent d’ailleurs étrangement au EcoVale.

Alberto et Horacio (Covas) auraient été les premiers à inventer le terme “monnaies sociales” …

Contact: Alberto Marino
elprosumidor@gmail.com

 

23. Un club de troc au service de la production locale

 

Le nodo de General Alvear illustre parfaitement l’utilité d’une monnaie complémentaire dans un pays en crise: dans une région agricole, les habitants disposaient de beaucoup de produits à échanger (vin, miel, fruits, légumes, jambon, lait) mais pas de monnaie pour effectuer ses échanges. Le troc a résolu ce problème, et ensuite pris une dimension plus importante en développant une activité de “club”, une activité sociale: club de foot, de danse… Le club comptait jusqu’à 5000 membres, soit 20000 personnes bénéficiant de l’activité des clubs, c’est à dire 50% de la population locale! Aujourd’hui le club n’existe plus.

Contact:

Gustavo Tutti, secrétaire du Parti Judizial à la maire de General Alvear : gustavotuti@gmail.com

 

24. 5 nodos toujours actifs, mais “ce n’est plus ce que c’était”

 

José Sandler, 92 ans, comptable à la retraite est engagé dans les clubs de troc du Globito Azul depuis ses débuts en 1998. Il est aujourd’hui le coordinateur des 5 nodos toujours actifs dans la région. Ces derniers accueillent encore 2500 personnes par semaine.

Mais les nodos ne sont plus ce qu’ils étaient. A partir de 2003, les nodos ont commencé à perdre l’essence même du troc, les membres se contentent juste d’acheter et vendre mais ne produisent plus. Au lieu d’échanger nourriture ou artisanat de sa propre production, les membres du club préfèrent acheter en gros sur le marché traditionnel pour revendre à l’unité dans les nodos.  Alors que “le troc c’est produire pour consommer”.

José Sandler témoigne d’un certain épuisement “l’idée est bonne mais elle demande beaucoup d’efforts” et d’une certaine désillusion “les gens ne sont plus solidaires, ils ne veulent plus travailler”.

Contact : José Sandler
0292-0430689

 

25. Le réseau le mieux organisé

 

Carlos Perez Lora est psychologue et fut un des chefs de file du réseau Mar y Sierras. Créé dans la lignée du RGT, en 2001 le réseau Mar y Sierras rejoindra le RTS.

De tous les témoignages que nous avons écouté, nous avons été impressionnés par l’extraordinaire organisation du réseau Mar y Sierras qui comptait différents organes de discussion, de décision et de contrôle; au niveau de chaque nodo mais aussi au niveau des zones et au niveau régional; des Commissions de coordinateurs (élus) mais aussi des Commissions de révision des comptes et des Commissions de Travail.

Tout un système bien élaboré pour garantir transparence et gouvernance. Ce réseau sera le seul à survivre à la crise du troc de 2002 et perdurera jusqu’à 2005 mais finira par s’effondrer comme les autres.

Contact : perezlora@ecolan.com

 

26. Le troc fait renaître l’entreprenariat

 

Beatriz Tela a 59 ans, elle est « tisseuse » et fait partie d’une coopérative de la province de Buenos Aires. Elle nous raconte comment le troc lui a permis de relancer son activité pendant la crise, comment le troc a changé sa vie.

Beatriz vivait à Traslaserria, un petit village de la province de Cordoba. En 1997, elle entend parler du troc à la radio. Traversant une période difficile tant économiquement qu’émotionnellement, l’idée du troc la touche particulièrement. Elle rejoint d’abord un nodo dans sa région mais Beatriz a l’intuition que le concept du club de troc peut aller bien plus loin. Souhaitant renforcer son engagement et son implication dans le réseau, elle décide de se rendre à Buenos Aire (8 mois plus tard, elle s’y installera définitivement). Beatriz fait le tour de différents nodos et rejoint finalement le nodo Obelisco qui propose un programme de formation pour lancer des microentrepreneurs (pour opérer dans les clubs de troc comme dans le marché formel).

Beatriz bénéficiera du premier programme de microcredit du nodo Obelisco. Avec Ana, Marta, Susana, et Lucia, elles forment le groupe « Fusion Cinco ».Chacune reçoit un prêt de 1000 créditos (à rembourser sur 3 mois) pour lancer sa propre activité mais toutes sont responsables les unes des autres. Si leurs activités sont différentes, elles sont toutes liées au même secteur d’activité (vêtements artsanaux). L’idée est de développer  la capacité entrepreneuriale individuelle grâce à l’appui du groupe.

3 mois après, le pari est réussi, chacune a réussi à lancer son activité et toutes ont remboursé le prêt.


27. Un SEL dans une école Steiner-Waldorf

 

Le Proyecto Mutuo, est un SEL créé par Javier Goglino, dans une école Steiner Waldorf de Buenos Aires. L’école, privée, est en recherche constante de financement. L’idée est donc de créer un SEL au sein de la communauté afin de réduire les dépenses de certains postes et de les financer via une monnaie complémentaire, comme le nettoyage et la maintenance de l’école.

Plus qu’une vraie solution de financement, il s’agit de créer un laboratoire d’expériences et de  sensibiliser les personnes à d’autres formes d’échanges, car le projet semble stagner à une très petite échelle, avec moins de 10 échanges mensuels sur la dernière année.

El proyecto mutuo, utilise un logiciel libre d’échanges sur internet, Cyclos, développé par la fondation STRO avec qui TAOA travaille en Uruguay, Equateur, et Amérique Centrale.

 

Contact: Javier Goglino

jgoglino@gmail.com

http://www.proyectomutuo.org/

http://www.cyclos.org/

http://www.socialtrade.org/